L’attention portée à la santé mentale en milieu de travail s’est accrue récemment, ce qui a donné lieu à une foule de modifications liées aux aspects juridiques, à l’empathie humaine et aux politiques organisationnelles. Il est de plus en plus évident que la santé mentale n’est pas seulement une préoccupation sociale, mais bien un enjeu fondamental lié au milieu de travail ayant des répercussions importantes pour les employeurs à l’échelle du Canada.
En collaboration avec Spring Law, Compagnie ADP Canada (ADP) a présenté un webinaire visant à mettre en lumière les questions complexes liées à l’obligation d’adaptation relative à la santé mentale et aux handicaps, afin d’offrir des perspectives aux employeurs qui souhaitent gérer ces situations avec soin.
TABLE DES MATIÈRES
Perspectives sur l’adaptation
Le webinaire mettait en vedette Caitlin Hurren, conseillère juridique chevronnée d’ADP qui possède une vaste expérience acquise auprès d’un large éventail de clients, dont des sociétés internationales et de petites entreprises. Lexa Cutler de Spring Law, avocate réputée en droit du travail et de l’emploi reconnue pour son approche efficace empreinte d’empathie en matière de résolution de problèmes juridiques en milieu de travail, l’accompagnait. Leur expérience a donné une base solide aux discussions qui ont suivi.
Situation actuelle relative à la santé mentale au travail
Les problèmes de santé mentale représentent la principale cause d’invalidité et touchent 450 millions de personnes à l’échelle mondiale. Selon l’article La crise est réelle du Centre de toxicomanie et de santé mentale, un nombre incroyable de 6,7 millions de Canadiens sont aux prises avec des problèmes de santé mentale, et un Canadien sur deux souffrira de maladie mentale avant l’âge de 40 ans. Ces chiffres mettent en lumière la fréquence des handicaps liés à la santé mentale et le besoin essentiel de mesures d’adaptation adéquates en milieu de travail.
Mesures d’adaptation pour les employés : par où commencer?
Si vous avez de la difficulté relativement à l’adaptation sur votre lieu de travail, il peut être utile de savoir par où commencer. Le point de départ pour gérer ces questions est la compréhension de la législation sur les droits de la personne, qui varie grandement à l’échelle du Canada. Chaque territoire de compétence comporte une forme de législation sur les droits de la personne, souvent appelée code des droits de la personne ou loi sur les droits de la personne, sauf au Québec, où elle est connue sous le nom de Charte des droits et libertés de la personne. Cette législation indique les motifs illicites de discrimination, définit la discrimination ou le harcèlement au travail et présente les recours à la disposition des employés. Les cadres législatifs sont semblables, mais pas identiques, dans les différentes provinces et les différents territoires. Ainsi, si vous avez des préoccupations, il est toujours préférable de consulter les lois propres à votre territoire de compétence.
En outre, vous pouvez examiner les politiques de votre lieu de travail, notamment au sujet des mesures d’adaptation, des drogues et de l’alcool, et de la discrimination, de la violence et du harcèlement au travail. Ces politiques énoncent habituellement le processus d’adaptation et les procédures particulières propres à votre lieu de travail. Si vous n’avez pas encore établi de telles politiques, vous devriez envisager d’en mettre en place, car elles peuvent augmenter l’efficacité et l’uniformité du processus d’adaptation.
Enfin, ne sous-estimez pas la valeur des programmes d’aide aux employés et des régimes d’avantages sociaux, qui peuvent s’avérer une ressource inestimable pour les employés aux prises avec des problèmes de santé mentale.
Comprendre l’obligation d’adaptation
Fondamentalement, l’obligation d’adaptation exige qu’un employeur modifie des règles, des politiques ou des pratiques afin de permettre aux employés ayant un handicap de participer pleinement sur le lieu de travail, jusqu’au point de la contrainte excessive.
Cette obligation est complexe et comporte deux composants : l’obligation procédurale, qui comprend l’obtention des renseignements nécessaires pour évaluer le handicap de l’employé et les mesures d’adaptation possibles, et l’aspect substantif, soit la mise en place réelle des mesures d’adaptation appropriées, jusqu’au point de la contrainte excessive. Les employeurs doivent mettre en place les composants procédural et substantif pour s’acquitter de leur obligation d’adaptation.
Étapes du processus d’adaptation
Les étapes ci-dessous peuvent faciliter le processus d’adaptation.
- Se renseigner :
La première étape du processus d’adaptation consiste à se renseigner. Dans le cadre de cette étape, il est important de souligner qu’un employeur a le devoir de se renseigner, et non d’enquêter. L’étape initiale ne doit pas être entreprise avec des doutes ou dans un objectif de confrontation, mais plutôt comme un moyen nécessaire de recueillir de l’information. Cette approche vise à comprendre les besoins de l’employé et à déterminer la meilleure façon de lui offrir des mesures d’adaptation, afin de satisfaire aux exigences procédurales et substantives de la loi. Dans la législation sur les droits de la personne, le terme « handicap » couvre généralement des troubles allant de l’anxiété à la dépression, en passant par les dépendances, et une meilleure pratique pour les employeurs consiste à commencer par l’inclusion, plutôt que par l’exclusion, lorsque surviennent des problèmes d’adaptation. Même si l’adaptation commence souvent par la demande d’un employé, l’employeur a le devoir important de s’informer de manière proactive au sujet des besoins potentiels d’adaptation, particulièrement lorsqu’il gère des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie, qui sont moins visibles et grandement stigmatisés. Ce devoir de s’informer est particulièrement important pour les postes critiques sur le plan de la sécurité, où les difficultés personnelles d’un employé peuvent avoir des répercussions sur son rendement et sur la sécurité des autres. Les demandes doivent être gérées avec discrétion, de façon à assurer la confidentialité et à créer un environnement sûr pour les employés qui ont besoin d’aide. - Étayer :
La deuxième étape du processus d’adaptation consiste à étayer la demande. Les demandes d’adaptation doivent être gérées au moyen d’une approche équilibrée. Les employeurs ont l’obligation d’accepter ces demandes de bonne foi et de demander des renseignements médicaux seulement s’ils en ont besoin pour comprendre le handicap, ses répercussions sur la capacité de l’employé à travailler et les mesures d’adaptation nécessaires. Les employeurs devraient utiliser des formulaires normalisés, comme un formulaire de détermination des capacités fonctionnelles, pour créer un processus transparent. Il existe une différence fondamentale entre la demande d’un diagnostic, soit une étiquette médicale, et la compréhension de la nature d’une blessure ou d’une maladie en langage clair. Cette distinction peut se révéler essentielle pour permettre à l’employeur de réduire l’intrusion au minimum, tout en remplissant son obligation d’adaptation. Les employeurs sont souvent confrontés à des défis lorsqu’ils tentent d’équilibrer le besoin d’information avec le respect de la vie privée de l’employé. Il est donc recommandé d’adopter une approche proportionnelle pour gérer les demandes en fonction des particularités d’une situation. - Adapter :
La troisième étape du processus d’adaptation est l’adaptation elle-même. Lors des discussions relatives au processus complexe d’adaptation relative aux handicaps mentaux et physiques en milieu de travail, il est important de se concentrer sur le cadre de travail global et les responsabilités distinctes des employés et des employeurs. Le processus d’adaptation s’appuie sur des principes axés sur le besoin de personnalisation, afin de s’assurer que chaque mesure d’adaptation répond aux besoins uniques de la personne. Cela renforce l’idée qu’il n’existe pas de solution universelle. Pour demeurer efficaces, les mesures d’adaptation doivent évoluer au fil du temps et être conçues pour favoriser l’intégration et la pleine participation, de façon à créer un environnement de travail inclusif sans obstacle. L’objectif consiste à toujours proposer la mesure d’adaptation la plus appropriée sans causer de contrainte excessive pour l’employeur et à rechercher des solutions qui procurent des occasions et des avantages égaux.
D’un côté, les employés ont la responsabilité d’exprimer leurs besoins, de fournir les renseignements nécessaires au sujet de leurs limitations et de participer activement à la recherche de solutions d’adaptation viables. Ils doivent également s’efforcer de satisfaire aux normes de travail à la suite de l’adaptation et collaborer avec les personnes qui participent au processus d’adaptation. De l’autre côté, les employeurs ont le devoir de s’informer de manière proactive au sujet des besoins potentiels, d’accepter les demandes de bonne foi, d’explorer rigoureusement les options d’adaptation et de documenter avec soin tous les processus pertinents. Ils doivent également privilégier la confidentialité, limiter les demandes d’information uniquement aux éléments directement pertinents et mettre en place les mesures d’adaptation en temps opportun. Cet effort de collaboration entre employés et employeurs est essentiel pour créer un environnement de travail qui respecte les différents besoins de l’ensemble des employés et y répond, tout en s’assurant que tous peuvent contribuer efficacement et sans obstacle.
Qu’est-ce qu’une contrainte excessive?
Lors des discussions au sujet des aspects complexes liés à l’obligation des employeurs d’offrir des mesures d’adaptation aux employés ayant un handicap, il est important d’insister sur le concept de « contrainte excessive ». Cette notion suggère que, même si les employeurs sont tenus d’offrir des mesures d’adaptation, cette obligation comporte des limites. L’ampleur des mesures d’adaptation requises se limite au point de contrainte excessive pour l’employeur. Cependant, la définition de contrainte excessive n’est pas simple et varie grandement d’un cas et d’un employeur à l’autre. Des facteurs comme la capacité de l’employé à effectuer ses tâches principales avec les mesures d’adaptation, des questions de sécurité et le coût pour l’employeur sont fondamentaux dans l’évaluation de la contrainte excessive. Même si la définition n’est pas claire, l’employeur doit prouver que les répercussions des mesures sont lourdes ou que les mesures entraînent des conséquences importantes sur le plan de la sécurité afin de pouvoir déclarer qu’il s’agit d’une contrainte excessive.Exemples de mesures d’adaptation en milieu de travail :
La satisfaction de l’obligation d’adaptation peut varier en pratique, car chaque situation est unique et les mesures d’adaptation doivent convenir à l’employé et répondre à ses besoins particuliers. Voici quelques exemples : - Modification des tâches et des échéances
- Modification des heures ou des politiques de pause - Attribution d’horaires de travail flexibles
- Congé à des fins de rétablissement ou de traitement - Communiquer :
La dernière étape du processus d’adaptation est la communication. En ce qui concerne les mesures d’adaptation pour les employés, il est impossible d’exagérer l’importance d’une communication efficace. Les employeurs ont la responsabilité de mettre en place rapidement les mesures d’adaptation et d’assurer un dialogue transparent et continu avec leurs employés tout au long du processus d’adaptation. Afin de reconnaître que ce processus est souvent long et parfois stressant pour les employés, les employeurs doivent tenir toutes les parties informées des mesures prises. Une bonne pratique consiste à conserver des dossiers détaillés, que ce soit des notes sur les appels avec les fournisseurs de soins de santé, des discussions internes au sujet des options d’adaptation ou des communications avec l’employé en question. Cette pratique peut devenir un outil essentiel pour prouver le processus, s’il est remis en question. De cette façon, les employeurs respectent non seulement leurs responsabilités en vertu de la loi, mais ils soutiennent aussi leurs employés avec empathie et compréhension, ce qui favorise un environnement de travail plus inclusif et accueillant.
Six points clés à retenir
- Obligation d’amorcer le dialogue relatif à l’adaptation :
Les employeurs doivent gérer de manière proactive les situations pouvant nécessiter des modifications spéciales du lieu de travail et engager des conversations avec les employés au sujet des mesures d’adaptation possibles. - Bonne foi relative aux demandes d’adaptation :
Il est fondamental que les deux parties, soit les employeurs et les employés, traitent et gèrent chaque demande d’adaptation avec sincérité et confiance, en supposant la validité du besoin. - Collaboration exigée dans le cadre du processus :
L’employeur et l’employé ont tous deux la responsabilité de participer activement au processus d’adaptation, en assurant une exploration approfondie et efficace des mesures d’adaptation possibles. - Engagement à offrir une adaptation complète :
Les employeurs doivent offrir aux employés les mesures d’adaptation nécessaires pour accomplir leurs tâches, jusqu’au point de la contrainte excessive. - Importance de la communication :
Un dialogue ouvert et continu entre toutes les parties est important pour trouver des solutions novatrices avantageuses à la fois pour l’employé et l’organisation et favorise l’obtention de résultats positifs. - Importance de la documentation :
La documentation minutieuse de chaque étape du processus d’adaptation est importante, car elle constitue une preuve claire des efforts, des réflexions et des décisions prises tout au long du parcours.
Tous les renseignements dans ce document sont fournis à titre informatif seulement et non dans le but de donner des conseils juridiques, comptables ou fiscaux. Les renseignements et services offerts par ADP ne devraient pas remplacer les conseils d’un professionnel en la matière. Ces renseignements sont par nature soumis à une révision et ne seront peut-être pas les renseignements les plus à jour.